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Distribution

Surcharge GDS : le grand poker menteur

Les protagonistes de cette histoire pourraient s’inscrire aux « world series of poker », les championnats du monde qui se déroulent chaque année à Las Vegas. Ils auraient une chance. Si dans la partie qui s’est déroulée entre novembre et la toute fin du mois de mars entre Air France, les GDS et les agences de voyages, les joueurs n’étaient pas de force égale, tous en revanche ont usé des méthodes du célèbre jeu de cartes. A commencer par le bluff…

 
Jamais le « money time », les toutes dernières minutes d’un match, la période où tout se joue et qui peut rapporter gros, n’aura aussi bien porté son nom. Il aura fallu attendre le 30 mars pour qu’Air France et Amadeus trouvent un terrain d’entente sur la surcharge tarifaire qui devait être appliquée dès le 1er avril. Retour sur ce qui n’est en fin de compte qu’une affaire de gros sous et de maîtrise de distribution, matinée de technologie.
 
En novembre 2017, suivant les traces des groupes Lufthansa et IAG, Air France annonçait son intention d’appliquer une surcharge de 11 euros par segment sur toutes les réservations de billets d'avion effectuées en GDS à compter du 1er avril. La compagnie expliquant sa décision par sa volonté de « pousser » les ventes réalisées à travers des canaux utilisant la nouvelle norme NDC de Iata basée sur la technologie XML. Une norme qui permettrait de générer plus de revenus additionnelles, à travers la vente de produits annexes (sièges, repas, bagages, wi-fi…) et qui supporterait plus de contenus multimédias, histoire de mieux valoriser le produit par rapport à ce qui est aujourd’hui possible en GDS.
Des arguments qui suscitent interrogations. D’abord parce que, si elle est ancienne, la technologie qu’utilisent les GDS a l’immense avantage d'être robuste, stable et particulièrement bien rodée, y compris en ce qui concerne l’après-vente et le back-office. Ensuite parce que si on comprend aisément l’intérêt d’offrir au grand public du contenu enrichi, c’est nettement moins évident en ce qui concerne des billettistes experts qui travaillent en agences ou en plateaux d’affaires. Enfin, ce n’est pas comme s'il était aujourd’hui complètement impossible de vendre des produits annexes en GDS.
 
On se rappelle l’émoi causé par cette annonce d’Air France dans la distribution. D’autant que les mois qui ont suivi sont traditionnellement ceux des congrès de réseaux et des Entreprises du Voyage. L’incertitude, l’angoisse et même la colère étaient palpables dans les rangs d’agents de voyages estimant être pris en otage par l’un de leurs « partenaires » historiques. L’incompréhension aussi. Face à un calendrier jugé impossible à tenir. De l’opinion générale il était impossible aux GDS, à Air France et aux agences de faire les développements technologiques dans les temps et donc de pouvoir basculer sereinement vers la technologie NDC au 1er avril.
Une date loin d’être innocente, qui explique les autres enjeux qui sous-tendent ce bras de fer. Car c’est en effet au 31 mars qu’a pris fin l’accord pluriannuel liant Air France et Amadeus. Un accord dit de « full content » qu’Air France, soucieuse de retrouver la maîtrise de sa distribution, ne voulait pas renouveler pour 5 ans. Or, disposer de l’ensemble de l’offre fait partie intégrante de la valeur ajoutée des GDS. Pour inciter les compagnies à la donner, ces derniers pratiquent une tarification différenciée. Sortir du full content a donc un coût pour Air France estimé à… 11 euros par segment. A cela, il faut ajouter un agacement de moins en moins dissimulé des compagnies pour le schéma économique qui prévaut depuis des années: les compagnies paient des fees aux GDS pour chaque booking, et les GDS en reversent une partie aux agences sous forme d’incentive. Pour preuve, à Lille durant les Journées des EDV, Jean-Marc Janaillac, PDG d’Air France KLM, a plus parlé de « la rente » des GDS que de technologie. Il est vrai que dans la chaîne de valeur, ces derniers jouissent d’une position plus que confortable et qu’ils n’ont jamais eu l’intention de voir la situation évoluer.
 
Enfin est arrivé le mois de mars et ses giboulées. Il s’est mis à pleuvoir des communiqués. Tout le monde ou presque a annoncé avoir signé des accords d’exemption de surcharge avec Air France. Une façon de mettre la pression sur le GDS puisque les accords en question étaient eux-mêmes suspendus à un accord entre Air France et Amadeus. Il a donc fallu attendre le 30 mars pour que ce dernier soit annoncé. Grosso modo pour être exemptées de surcharge en réservant dans Amadeus à travers un canal privé, les agences ou leurs réseaux doivent signer un contrat avec Air France (Channel Private Agrement) à travers lequel elles renoncent à leurs incentives GDS, ce qui impliquera, par effet de répercussion, une baisse de la facture GDS d’Air France.
Accords commerciaux privés oblige on ne sait pas quels efforts ont été consentis de part et d’autre pour parvenir à ce presque « statut quo ante », puisque contrairement à la situation initiale, Air France n'est désormais plus par un accord pluriannuel en ce qui concerne la distribution de son offre. Bref, comme le résume Jean-Pierre Mas, président des EDV : «Tout aurait pu se faire tellement mieux, avec plus de douceur, sans agressivité. Que de temps et d’énergie nous avons gaspillé ! Tout ça pour ça…»

Auteur

  • Mathieu Garcia
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