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Hébergement

Tribune : "Hôteliers et agriculteurs, même système, même destin ?"

Dans une tribune qu'il nous a adressée, Rachid Gorri, consultant marketing, communication et stratégie, fait un parallèle entre le destin des agriculteurs et celui des hôteliers : "les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets"."Depuis environ une dizaine d’années, les relations entre les OTA et les hôteliers défraient la chronique et cela n’échappe plus à personne.
Même les politiques se sont emparés de ce conflit en le transformant en une "affaire légitime" pour finir par le récupérer et enfin calmer les esprits pour un temps. Hélas, Ils savent pourtant que cette "cause" est perdue d’avance pour les plaignants car elle est en contradiction frontale avec les principes élémentaires de l’économie de marché. On ne peut pas remettre en cause du jour au lendemain les fondements de l’économie de marché pour satisfaire telle ou telle organisation. Par ailleurs, nous savons tous que notre système économique n’est pas parfait et qu’il implique des situations qui sont parfois aux antipodes du bon sens, de l’éthique et de la morale.


Pouvoir limité des politiques


Mais, me diriez-vous, il est très rare que les politiques fassent des étincelles quand ils s’en mêlent. Ils ont beaucoup de volonté, mais peu d’action. Il faut simplement accepter l’idée que leurs pouvoirs sont limités face aux mécanismes mondialisés du marché et ne pas attendre ni espérer que des solutions se mettent à pleuvoir par le seul fait d’entendre leurs beaux discours. En revanche, sans tarder il faut vous mettre vous-mêmes à la recherche de solutions à vos propres problèmes. Oui, les producteurs hébergeurs (les hôteliers) sont toujours pris en tenailles entre l’Etat qui les écrase en leur infligeant régulièrement des charges toujours nouvelles (divers impôts et taxes, réglementation,…) et les OTA qui les assomment en amputant sur chaque réservation des commissions abusives et des contraintes tarifaires pour ainsi "happer" une part non négligeable de leurs maigres marges.


Se résigner ou agir ?


Cet état des choses semble à présent normal et ne choque plus personne à l’exception des professionnels de l’hébergement touristique représentés en majorité par les hôteliers, ce qui justifie leur protestation.   L’histoire relativement récente du modèle de la grande distribution nous éclaire assez bien sur le processus des rapports de force qui s’est construit au fil des années (depuis 1960 jusqu’à présent). Par la suite, des lois comme la loi Galland de 1996 sur l’équilibre des rapports de force des partenaires commerciaux et celle de Raffarin pour développer le commerce et l’artisanat ont été élaborées pour mettre un peu d’ordre dans la confusion qui régnait à cette époque. Depuis des décennies, eu égard au déséquilibre des rapports de force, les producteurs de produits de grande consommation (PGC) partenaires des distributeurs notamment dans les domaines alimentaires, vont jusqu’à vendre à perte leurs produits, ayant un salaire inférieur au SMIC pour plus de 60 heures/semaine travaillées, ce qui est à l’origine de conflits récurrents. Ces protestations ne passent pas inaperçues car les médias nous les exposent en détail par des images chocs d’agriculteurs mécontents, répandant leurs productions sur les routes et devant les édifices de l’Etat pour dénoncer l’injustice dont ils sont victimes…

Avec la grande distribution, des milliers d'exploitations ont disparu

Une question se pose à présent : Quelque chose a-t-il changé pour ces producteurs plaignants de la grande distribution après d’innombrables manifestations de colères, de contestations et d’interminables négociations auprès des ministères concernés non seulement au plan national mais aussi Européen ? La réponse est non, malheureusement. Malgré toutes ces plaintes pour se faire entendre, rien ou presque n’a changé, sauf que des milliers d’exploitations ont disparu et beaucoup d’autres survivent tant bien que mal. Ils restent toujours dominants, voire très étendus car les producteurs acceptent de payer des "tickets d’entrée" de plus en plus élevés pour seulement être référencé dans les centrales d’achats des distributeurs. Ensuite viennent les conditions de vente et de partenariat qui font souvent froid dans le dos. Le secteur de la grande distribution nous montre bien que seules les grandes marques comme Danone, Colgate, Nestlé, Coca-Cola et autres ont un pouvoir suffisamment important pour faire jouer la concurrence chez les distributeurs que sont par exemple, Leclerc, Auchan et Carrefour. On ne pourra pas en dire la même chose des hôteliers face aux OTA. En résumé, seules les grandes marques connues par tous arrivent à tenir tête à la grande distribution grâce à leur fort pouvoir de négociation gagné en grande partie par leur maitrise de gestion des mécanismes des marques "Brand management".


Le même schéma est en marche dans l’hôtellerie


Le même scénario se reproduit dans le secteur du tourisme, car seules les grandes marques des chaines intégrées résistent aux OTA, mais pour combien de temps encore ? Bien sûr, il ne faut pas oublier de dire que d’autres modèles économiques et de distribution parallèles naissent dans ce contexte et semblent tenir la route en se spécialisant et en se positionnant sur des petits marchés de niches. Cela a déjà commencé dans l’hébergement touristique depuis quelques années.  Cependant, cela ne règle pas le problème. Dans ce qui nous préoccupe, en l’occurrence le secteur de l’hôtellerie, ce sont les chaînes intégrées qui s’en tireront sans trop de dommages grâce aux investissements importants consacrés à la technologie de leurs systèmes d’information. Les deux premiers grands groupes hôteliers ont déjà provisionné des sommes importantes jamais investies jusqu’à présent dans la technologie de l’information, de la distribution et de l’extension de leurs marques en rachetant et en en créant d’autres. Elles ont compris depuis longtemps qu’elles doivent beaucoup pour ne pas dire tout au Brand Management, encore faut-il en maitriser les techniques…Quant aux  chaînes volontaires et aux indépendants, ce phénomène ne semble pas les inquiéter outre mesure car on n’y relève pas ou très peu d’investissements significatifs pour se préparer à affronter ces bouleversements. Malgré un potentiel important qu’elles n’ont jamais su exploiter pour gagner en leadership, leur pouvoir de négociation demeure trop faible. Leurs rapports à l’innovation, à la communication et au marketing restent très ambigus depuis toujours. Elles prennent alors le risque de sombrer dans un état permanent de dépendance par rapport aux OTA. Par conséquent, elles finiront au mieux par être emportés dans des processus d’intégrations verticaux amont et/ou avals, mais aussi horizontaux. Elles pourront aussi envisager des processus de reconversion, de transformation pour des usages ou des activités nouvelles et au pire, disparaitront progressivement comme c’est le cas des exploitations agricoles jusqu’à présent.


D’importants évènements marqueront le début d’une ère nouvelle pour l’hôtellerie


Les premières intégrations verticales et horizontales dans l’hôtellerie (production) et dans la distribution (OTA) auront lieu dès 2015/2016. Un nombre important de compagnies aériennes se mettront à nouer des alliances et des partenariats stratégiques avec les hôteliers. Ces processus se poursuivront pour atteindre leur phase de maturité vers 2020. La Chine nous a déjà montré son intérêt pour réaliser des reprises dans le parc hôtelier ainsi que dans d’autres segments de produits touristiques Français mais aussi ailleurs dans le monde. Ces mouvements se sont d’ores et déjà manifestés, mais sans faire trop de bruit. Ce n’est qu’un premier pas dans la marche vers une  nouvelle configuration du secteur du tourisme. La fusion de deux plus grands groupes de la réservation hôtelière et touristique et les alliances de certaines compagnies aériennes ne se passeront pas sans douleur pour leurs partenaires hébergeurs. Des complications et des rigidités contractuelles nouvelles verront le jour, comme par exemple, l’ajout au contrat d’un "ticket d’entrée » annuel pour le seul référencement dans la base de données des distributeurs hors réservation et commissions, l’augmentation des taux de ces dernières bien entendu, l’exclusivité de la distribution ajoutée au  parity-rate et une main mise quasi-totale sur les stocks des chambres.   Bien entendu, d’autres « coûts cachés » viendront s’y ajouter comme le paiement des publicités, du nombre de photos de la vitrine  et du ranking des hôtels pour une meilleure visibilité (dans les 2 ou 3 premières pages du moteur de recherche), etc. Il faudra bien sûr financer ces fusions et accepter leur complexité, ce qui, il faut bien le dire amplifiera considérablement des tensions déjà trop fortes entre ces partenaires.  Ce type d’alliance ou de fusion s’inspirera du même modèle « copier/coller » de type Carrefour et Promodès qui a donné naissance en 2000 à l’un des deux ou trois plus grands groupes mondiaux de la distribution dont le chiffre d’affaires dépassait les 50 milliards d’euros à l’époque. Ce qui va accélérer ce phénomène à présent, c’est la maitrise de leurs stratégies d’internationalisation grâce à une forte demande touristique internationale déjà en place depuis assez longtemps. Il ne leur reste plus qu’à négocier les conditions de mise en œuvre de ces fusions. Parallèlement à cela et par un effet domino, à l’instar des alliances stratégiques effectuées par les entreprises des autres secteurs d’activités et qui ne cessent d’augmenter, de nombreuses intégrations verticales et horizontales imposeront à leur tour, une nouvelle configuration de la distribution de l’ensemble des domaines de l’hôtellerie et du tourisme de France et du monde.


Ne pas avoir peur du changement en disant tout simplement adieu à la routine

 

Fort heureusement, des actions à mener existent toujours pour "surfer" sur la vague de ces transformations d’envergure. En voici parmi elles un échantillon non exhaustif de quatre conseils: a) Poser les bonnes questions pour prendre les bonne décisions par rapport à la nouvelle distribution qui est-il ne faut pas l’oublier- la variable la plus importante du marketing, b) ne pas avoir peur du changement en disant tout simplement adieu à la routine,  c) enrichir le modèle économique en explorant profondément l’ensemble de ses composantes pour procéder à des modifications génératrices de valeur ajoutée -de marge- d) mettre en place un système d’information pour commencer à construire une stratégie marketing".

 

Auteur

  • La Rédaction
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