L’envie ne suffit pas toujours.
24 heures avant la liquidation officielle par le tribunal de commerce de Paris, le groupe Travel Europe a livré sa vérité sur l’affaire Donatello. "En toute transparence" déclare Helmut Gschwentner, son directeur général.MAJ le 12/2/15 après la "liquidation judiciaire sans poursuite d'activité" de Donatello .Comme un enfant devant un beau vélo en vitrine, Travel Europe a voulu s’offrir Donatello. "Une opportunité" à ne pas laisser échapper se sont dit les dirigeants du groupe autrichien et de sa filiale française, Visit Europe. Mais le morceau était – trop – gros (avec "un CA de 75 M€" pour Donatello*, contre "16 M€ en 2014 pour Visit Europe") et le risque économique, financier et social aussi. Le renoncement a été décidé en 24 heures. Comme si la grève des greffiers au tribunal de commerce avait permis à la voix de la raison de l’emporter sur la passion.
Enthousiasme et calculs
"On était tous d’accord pour cette reprise, on l’a votée à main levée à l’unanimité" raconte Pascale Gaston, DG de Visit Europe.
"On était prêts à supporter une baisse de moitié de l’activité. Mais le juge a parlé d’un délai éventuel de 3 semaines, ce qui réduisait encore plus le potentiel. Car cela signifiait une brochure imprimée et diffusée au mieux mi-mars, plus vraisemblablement fin mars", explique Simona Wechsel Berger, directrice administratif et financier.
"Beaucoup trop tard pour nous. Nous engrangeons actuellement les ventes sur notre production été de Travel Europe (groupes)-Visit Europe (individuels). La saison se vend maintenant", précise Helmut Gschwentner, DG de Travel Europe.
Pourquoi Welcome Donatello
Le DG du groupe Travel Europe a voulu jouer la transparence. Le 11 février, face à la presse, il a souhaité dire sa vérité. Kbis et statuts à disposition, Helmut Gschwentner explique : oui, la société Welcome Donatello a été créée pour servir de structure après le rachat prévu de l’activité tour operating de Donatello. C’était une filiale à 100% de Visit Europe. Dotée de 500.000 euros sur fonds propres, elle est conservée. "Mais puisqu’on ne rachète plus Donatello, elle va être renommée Visit Invest" annonce-t-il.
Quid de la marque Donatello ?
Le rachat de la seule marque Donatello est-il alors envisageable ? "La marque est belle", reconnaît Helmut Gschwentner après avoir dû y renoncer. Mais pour les équipes du dirigeant, l’histoire est terminée. "Cela n’aurait plus vraiment de sens". S’il y a enchères, "on regardera" mais pas sûr que cela soit opportun. Les Autrichiens semblent échaudés. "Par les procédures, par les réactions des salariés, par les critiques dans la presse".
Trop de risques. Trop d’incertitudes. Trop français
Helmut Gschwentner l’admet, le package Donatello était attirant : "une activité moyen-courrier -surtout l’Italie- complémentaire de la nôtre et un nouveau logiciel B2B de configuration de voyage". Lorsque les dirigeants actuels de Donatello contactent ceux de Travel Europe, on est le 19 décembre.
"C’était déjà tard pour pouvoir monter tout un plan de reprise. On a travaillé à 200% avec les équipes à Paris et à Stanz pour trouver comment intégrer Donatello" explique le DG de Travel Europe. "Nous n’avions pas beaucoup d’éléments, pas assez mais on s’est lancés". Peut-être trop vite.
Garantir tous les départs y compris sur Equatoriales allait peser lourd avant de pouvoir commencer à engranger le premier euro. Les contrats à renégocier, même pour acquérir de nouveaux fournisseurs, "n’étaient pas à moindre coût" au vu des arriérés. La grève des greffiers est l’occasion de passer en revue le projet encore une fois. De façon définitive.
Pourquoi seulement 19 salariés ?
La reprise de l’équipe dirigeante était incluse dans le deal de départ. "Cela semblait logique pour assurer le suivi de la marque, le savoir-faire". Plus que l’équipe aux manettes depuis moins de deux ans, les Autrichiens voient l’image Donatello. Pour continuer l’activité, Travel Europe prévoit donc de reprendre 16 personnes (dont les 11 ex-Marmara), puis 19.
"Nous avions besoin de certains profils de postes, nous en avons formulé la demande auprès de l’administrateur judiciaire qui a désigné les personnes correspondantes", explique Pascale Gaston. "Nous ne connaissions pas les personnels, et nous ne pouvions pas tous les absorber. Il existe des critères de reprise que l’administrateur a appliqués. A l’époque, quand Travel Europe a repris Visit Europe, en difficultés, il n’y a pas eu de plan social, se souvient-elle. Ce n’est pas la culture maison. La reprise de Donatello nous tenait à coeur".
Chez Visit Europe, les demandes sur l’Italie ont nettement augmenté "dès le 29 décembre" [date de l'annonce de cessation de paiement, NDLR]. "Nous avons nos deux circuits sur l’Italie qui se vendaient déjà bien avant, mais nous allons sûrement augmenter nos capacités et nos produits sur la destination" explique Simona Wechsel Berger. Et pourquoi pas embaucher des gens de Donatello ? "Bien sûr, ce sont des salariés expérimentés et un bon forfaitiste est difficile à trouver, souligne Pascale Gaston. Si nous le pouvons, nous le ferons."
* Dans son jugement rendu le 12 février à 15h, le tribunal de commerce de Paris mentionne un chiffre d'affaires de 17,130 M€ en 2013 pour la société Euro Services Voyages (raison sociale de Donatello) et un passif de plus de 9,155 M€