Les mondes virtuels des jeux vidéo deviennent précurseur. Aujourd’hui, le streaming s’impose dans tous les esprits principalement grâce aux grands acteurs du cloud.
Le rachat d'Activision est historique. C'est la première fois que 68 milliards de dollars sont échangés pour une acquisition dans ce domaine. De plus la bipolarisation est en marche. Après une grande vague de rachats par Tencent, maintenant, les investisseurs Américains se lancent aussi dans un processus de concentration les uns avec les autres favorisant l’émergence de méta catalogues.
Le marché du jeu vidéo reste le premier marché des médias
Il représente aujourd'hui la somme colossale 180 milliards de dollars de chiffre d'affaires annuel. Comment imaginer qu’il puisse ne pas y avoir d'impact sur les consciences ? Compte tenu des montants concernés et de l'importance culturelle du jeu vidéo et des moyens de communication, il s’agit d’un véritable enjeu stratégique. L’exemple de la Chine qui limite le temps de jeu de tous les jeunes à quelques heures par semaine accompagne en fait le marché des Mergers & Acquisitions ou Acquisitions-Fusions en français.
Interview Ivan Lebeau, Président et fondateur de la société Gamestream, spécialiste mondial des solutions de Cloud Gaming en marque blanche.
Cette entreprise française propose une technologie propriétaire de streaming combinée à un catalogue étendu de jeux vidéo. La solution Gamestream est déployée en marque blanche en Europe, au Moyen-Orient et en Asie, notamment par Etisalat (UAE), Telkom Indonesia, Sunrise (Suisse), Chunghwa Telecom (Taïwan), Bouygues Telecom (France) Telekom Slovenije (Slovénie) ou encore par le groupe Accor. En décembre 2020, Gamestream a dévoilé Pleio, sa marque de Cloud Gaming grand public, disponible chez Bouygues Telecom. Basée à Paris et Nancy, Gamestream emploie 40 personnes.
i-tourisme : Que propose la société Gamestream ?
Ivan Lebeau : Personnellement, je travaille dans le domaine des jeux vidéo depuis les années 90. J'ai commencé à œuvrer dans le cloud gaming il y a une dizaine d'années et nous avons créé Gamestream il y a cinq ans pour devenir un leader dans les jeux vidéo en B2B. Nous proposons une solution en marque blanche principalement à des groupes télécoms, à des éditeurs de jeux vidéo, et maintenant également à des groupes d’hôtel qui permettent donc de streamer, des jeux console à tout le monde pour le grand plaisir des joueurs.
i-tourisme : Vous ne développez pas de jeu, vous prenez des jeux existants que vous intégrez sur une plateforme pour jouer en streaming, c'est à dire pas nécessairement avec des consoles.
Ivan Lebeau : Oui. Nous faisons appel à un réseau d'éditeurs internationaux qui vont de Capcom et Konami en passant par Disney, Codemasters, Electronic Arts et beaucoup d'autres. Nous diffusons leurs contenus que nous portons alors dans nos solutions cloud. Le fonctionnement reste très proche de celui de Netflix. En payant un abonnement de huit dollars par mois, vous pouvez ensuite participer en multi-joueurs à tous les grands hits du moment. Il s’agit d’un service complet et en plus complètement multiplateforme.
i-tourisme : Quels sont les jeux qui ont le plus de succès avec Gamestream ?
Ivan Lebeau : C'est un sujet intéressant car nous sommes présents dans sept pays différents et bientôt huit : en Asie, au Moyen-Orient et en Europe. Le succès dépend considérablement du territoire concerné. Dans les pays ou l’émergence des jeux vidéo reste récente, ce sont les hit du mois qui fonctionnent le mieux tandis que dans les pays historiques ce sont les blockbuster qui cartonnent.
Et puis, nous proposons énormément de jeux indépendants, avec des jeux un peu plus spécialisés qui marchent aussi très bien.
i-tourisme : Les problématiques techniques sont nombreuses, notamment autour de la latence. Il faut pouvoir garantir un peu un bon fonctionnement. Quels sont les prérequis et les technologies d’accès nécessaires ? Fibre ? 5G ?
Ivan Lebeau : Alors effectivement, nous bénéficions aujourd’hui de l'amélioration des réseaux qu’ils soient de type fibre ou 5G. Nous avons même accompagné le lancement de la 5G en Suisse, à Taïwan, en France, également à Dubaï. C'est une très bonne chose pour nous. Il nous faut un débit minimal de 3 à 4 Mbits, ce n'est pas énorme. Dans la pratique c’est accessible quasiment partout quel que soit le type de public. Nous apportons la solution directement depuis nos serveurs en exploitant au mieux la bande passante des opérateurs.
I Petite Entreprise : Est-ce que les core gamers viennent aussi vers ce type de technologie ?
Ivan Lebeau : Justement, au départ, nous étions positionnés sur un public cible extrêmement familial, casual ou même des vétérans gamer, qui ont beaucoup joué et qui jouent moins maintenant principalement en utilisant la télévision. Nous avons maintenant complété toute notre offre avec un service dédié aux éditeurs qui leur permet de streamer les démos de leurs jeux en train de sortir. Ainsi les core gamers peuvent les tester avant de les acheter. Ce nouveau service démarre en trombe et va rapidement devenir un point très fort de l'activité chez Gamestream en 2022.
i-tourisme : Un petit mot sur les techniques que vous utilisez ? Quel type d'outil de développement ? Comment s’organise l’hébergement ? Chez qui ?
Ivan Lebeau : C'est la chance de Gamestream. Dans l'ADN de de la société, il y a à la fois des commerciaux, tournés vers le commerce comme moi et d’un autre côté toute l'équipe des développeurs et de la R&D qui est extrêmement investie et basée à Nancy. Cette dernière se constitue d’une quinzaine de personnes talentueuses dans le streaming de jeux. Pour nous, le vrai défi technique est de fournir un streaming de la meilleure qualité possible avec des images qui sont très différentes d'un joueur à un autre. Dans le cas de la vidéo ou de la musique, c'est la même vidéo, la même musique pour tout le monde. Tandis que pour le jeu vidéo, tout dépend de ce que fait le joueur exactement 10 millisecondes avant. Nous avons conçu une technologie avec des outils maison, nos logiciels et nos développements propriétaires. Tout ceci permet d'obtenir une latence de 10 ms que le joueur ne perçoit absolument pas.
Il devient alors possible de streamer ces jeux avec des qualités aussi hautes que 1080p que 4K. Tout dépend ensuite de la qualité du service que nous souhaitons apporter au public.
i-tourisme : Les métavers étant très en vogue, les jeux vidéo sont-ils leurs précurseurs ? Notamment avec les aspects très immersifs ?
Ivan Lebeau : La comparaison est très amusante. Aujourd'hui, la grande nouveauté c’est l’utilisation du mot metavers pour désigner ce qui s’appelait mondes virtuels à l'époque. Et de plus aujourd'hui, la technologie est suffisamment évoluée pour que ce qui nous paraissait de la science-fiction il y a vingt ans, devienne aujourd'hui une réalité. Ainsi, nous disposons maintenant de cette capacité à ajouter des aspects olfactifs, pourquoi pas tactiles dans nos univers virtuels.