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Roselyne Bachelot-Narquin, en invitée d’honneur au congrès Selectour

Avec beaucoup d’humour, d’anecdotes truculentes, de portraits piquants … madame la ministre a tenu la salle pendant plus d’une heure à Doha. Interrogée par Francois Xavier Izenic sur le PACS, elle affirme que son discours de 1998 se considère comme un des plus beaux de la République

Le voici :

Monsieur le président de la République, madame la garde des Sceaux, mes chers collègues, c'est l'honneur d'un parlementaire de voter selon sa conscience et c'est l'honneur d'un groupe parlementaire d'accepter les différences.

Alors que, seule du groupe du Rassemblement pour la République, je m'apprête à voter le pacte civil de solidarité, je veux dire très simplement ma fierté d'appartenir au RPR et à son groupe parlementaire.

Je veux remercier Philippe Séguin et Jean-Louis Debré de m'avoir proposé de m'exprimer en toute liberté ; je ne sais pas s'il est beaucoup d'autres formations qui en auraient fait autant.

Oui, il est utile qu'existe dans notre droit une structure de compagnonnage, impliquant une solidarité globale entre deux personnes qui ont choisi de vivre ensemble.

Éclatement et rétrécissement des familles, allongement de la durée de la vie, affaiblissement des solidarités de voisinage, refus du mariage par certains jeunes parents, volonté d'homosexuels d'inscrire leurs relations dans un cadre stable, qui de nous ne connaît de telles situations ? Qui de nous n'a repéré ce besoin d'un cadre protecteur que ressentent deux personnes qui vivent ensemble ? C'est le sens de la réflexion que j'ai menée au cours de ces dernières années et du cadre normatif que je souhaite voir dans ce nouveau statut.

Ce contrat, tout d'abord, doit être clairement distinct du mariage. Il est paradoxal d'entendre certains craindre une parodie du mariage pour regretter, ensuite, que ce contrat ne présente pas les mêmes contraintes.

Le mariage est à respecter et à protéger dans sa dimension symbolique unique. Il est, je le redis avec force, la structure la mieux adaptée à l'accueil des enfants, car il inscrit le couple parental dans la durée et il établit la filiation non seulement avec le père et avec la mère, mais aussi avec la famille paternelle et maternelle.

Mais le moindre avantage de notre débat n'aura pas été de nous conduire à nous interroger sur le sens du mariage républicain, qui ne saurait se résumer à la procréation, ni simplement à resituer l'individu comme sujet de droit dans un couple puisque - et c'est heureux - nous n'utilisons plus nos enfants comme objet de troc ou comme objet de pouvoir quand ils se marient.

Nous serions plus sereins pour discuter si nous n'avions pas, collectivement, laissé le mariage républicain perdre sa substance.

Il nous faut, comme le proposait Georges Duby, retrouver dans le mariage l'image de notre propre perfection et, ainsi, bien des questions ne se poseront même plus.

J'en viens tout naturellement à mon deuxième concept fondateur. Cette structure nouvelle n'est pas, en tant que telle, un lieu d'accueil de l'enfant. Il est également paradoxal d'entendre dénoncer une dérive ultérieure vers un droit à l'adoption ou à la procréation médicalement assistée, et regretter que le statut de l'enfant ne soit pas prévu dans le nouveau contrat ; pour cause ! Cependant, les enfants qui pourraient naître de parents compagnons entre eux ou avec d'autres auront les droits inaliénables qui leur sont reconnus, et qui sont les droits de tous les enfants nés de parents concubins ou mariés, ni plus, ni moins, et les parents qui les auront conçus auront vis-à-vis d'eux les mêmes devoirs de prise en charge matérielle et morale, ni moins, ni plus.

Mais ce statut du compagnonnage ne peut-être l'addition de mesures éparses, comme je l'entends avancer parfois. Il doit refléter une vision large de solidarité. On peut partager un appartement avec un ami ou souhaiter faire hériter un proche sans, pour autant, prendre un engagement d'entraide vis-à-vis de lui. Se pose alors une autre question : faut-il donner aux contractants des droits fiscaux, sociaux et successoraux, puisque ces droits seraient le corollaire de services rendus à la société ? J'affirme que ces droits sont légitimes puisque, durant la durée du pacte, l'engagement d'entraide supplée et remplace tout ou partie des dispositifs sophistiqués de notre protection sociale. Il y a donc bien service rendu.

Le texte qui nous est proposé aujourd'hui est certes perfectible - ô combien ! -, il mérite d'être éclairé, approfondi et prolongé, mais il correspond aux critères que j'avais fixés : une entité nouvelle de solidarité, large, nettement différente du mariage, et ne constituant pas une structure d'accueil de l'enfant.

Enfin, pour lever toute ambiguïté, je tiens à répondre à cette question : le pacte de solidarité a-t-il pour origine une revendication portée par des associations homosexuelles ? Eh bien oui ! Mais qui mieux que les homosexuels pouvaient, à partir d'une expérience de solitude, de rejet et de mépris faire le diagnostic des difficultés qui rongent notre société ?

Ils et elles ne veulent ni le dégoût des saintes ni-touches ni la commisération des dames patronnesses.

Cela a été l’honneur de ces associations de faire de propositions qui refusaient les solutions communautaristes forcément stigmatisantes pour bâtir un projet ou chacun et chacune d’entre nous pourrons se retrouver, lui ses enfants ses parents à un moment à l’autre de sa vie, car finalement nous nous reconnaissons qu’une communauté : la République.

 

Auteur

  • Chantha Chea
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