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Transport

Les grands chantiers d'Air Austral : Le point avec Jean-Marc Grazzini, directeur général adjoint

La compagnie réunionnaise Air Austral n'en finit pas d'innover. En nouant des partenariats stratégiques, commerciaux ou capitalistiques, comme récemment avec Air Madagascar, ou en améliorant son produit grâce à une flotte moderne et récente. L'idée est non seulement de développer du trafic au départ de l'océan Indien autour du hub de l'île de la Réunion, mais aussi de contrer l'arrivée de nouveaux acteurs très offensifs sur une ligne métropole-Réunion déjà très fréquentée. Le point avec Jean-Marc Grazzini, son directeur général adjoint.

 
Combien de vols quotidiens proposez-vous entre Paris et la Réunion ?
Aujourd'hui, Air Austral propose 1 à 2 vols par jour. Toutes compagnies confondues, l'offre entre Paris et La Réunion est de 3 à 6 vols par jour, en fonction de la saisonnalité. Ce sont généralement de gros modules. Chez Air Austral nous proposons 438 places sur nos B777 que nous avons dé-densifiés pour avoir un meilleur produit.
 
Quelle est la part des voyageurs réguliers ?
Elle est énorme. 60% à 70% de nos passagers sont des clients réguliers. Avec un bémol toutefois : la fréquence de leur régularité. Notre programme de fidélité qui s'appelle Capricorne compte aujourd'hui 260.000 membres.
 
Comment se compose votre flotte ?
Nous avons deux B737-800 de 162 places qui assurent les liaisons régionales. Nous avons également deux B787 de 262 places. Et trois B777 de plus de 400 places. Nous avons donc une bonne offre en matière de modules. Les B777 volent entre La Réunion et Paris, les B787 entre La Réunion, Mayotte et Paris, et entre La Réunion et Bangkok. Le reste du réseau est couvert par les B737-800. Nous avons aussi trois ATR qui font essentiellement du Réunion-Maurice, mais ils vont progressivement être transférés à Ewa, notre filiale, compagnie régionale de Mayotte. Bien que notre flotte soit très jeune (1,3 an d'âge en moyenne sur le long-courrier), nous allons renouveler quelques appareils en 2020 et 2021. Par ailleurs, il nous reste un avion à reconfigurer avec les nouvelles cabines. Ce sera fait en octobre 2017. Les appareils que nous avons remplacés avaient 7 à 8 ans d'âge.
 
Vous n'avez pas d'Airbus ?
Nous avons surtout des Boeing, mais n'y voyez aucun parti-pris. Nos choix jusqu'ici se sont faits en fonction de critères stricts comme le prix de l'appareil, ses émissions sur une route donnée, ou encore l'emport fret. Je vous rappelle à ce sujet que le fret est très important pour nous. Il représente 40 millions d'euros par mois.
 
Quels sont vos objectifs pour 2017 ?
Sur le marché de la métropole nous avons pour objectif une hausse de 7% de nos ventes. Et, au global, notre budget prévoit un RSKO* en progression de 10%. C'est très ambitieux.
 
Quelles sont vos lignes les plus prometteuses ?
Mayotte-Paris, c'est sûr ! Je crois aussi beaucoup au développement de Madagascar. Ce pays va avoir une croissance forte dans les années qui viennent. Sa croissance a été longtemps bridée. Mais aujourd'hui nous voyons bien que tout le monde s'intéresse à cette île, le FMI en tête. Quant au trafic avec la métropole, il représente actuellement 45% de nos passagers et entre 70% et 75% de notre chiffre d'affaires. Il va également continuer à croître, mais ce ne sera pas une croissance à deux chiffres.
Nous verrons aussi notre capacité à travailler l'Asie. Je pense qu'il existe des flux de trafic très intéressants entre l'Asie et l'Afrique.
 
Quels sont vos rapports avec la distribution ?
Tout dépend des marchés sur lesquels nous opérons. A la Réunion nous avons une importante part de ventes directes. En métropole, c'est beaucoup moins le cas: 80% de nos ventes sont faites à travers la distribution. Nous sommes très bien implantés dans les réseaux. Nous avons une relation privilégiée avec les agences de voyages qui dure depuis de nombreuses années. Notre bonne image auprès de la distribution est notamment due à la qualité de notre helpdesk et de nos équipes commerciales. En revanche, sur la métropole -marché qui nous intéresse le plus-, nous devons aussi améliorer la notoriété de la compagnie en BtoC. Mais nous sommes une petite compagnie et nos budgets sont limités. Nous ne pourrons pas faire de grandes campagnes TV ou d'affichage en 4 par 3. En revanche, nous pourrons certainement communiquer davantage sur les nouveaux médias.
 
Quels "plus" proposez-vous pour améliorer l'expérience Air Austral à bord ?
Nous avons toute la gamme des "Extras". L'Extra wifi, l'Extra repas, l'Extra bagage, les Extra sièges et, bien sûr, l'Extra couchette. D'une façon générale, notre produit long-courrier est plébiscité par la clientèle dans les trois classes de service. L'Extra couchette est un produit très original. Si vous avez acheté 3 sièges, le produit extra couchette vous coûtera 150 euros. Vous avez une couchette moelleuse qui s'installe sur 3 sièges. Vous pouvez y faire dormir une maman et deux enfants, par exemple. Ou alors un couple… Mais c'est surtout un produit dédié aux familles. Il est en vente depuis décembre et rencontre de plus en plus de succès. Nous le proposons sur 10 rangs côté hublots qui sont disséminés dans la première partie de l'avion. Quant à l'Extra wifi, il démarre à 5 euros. Nous sommes les seuls à le proposer sur cette route. Notez que comme nos avions sont neufs, nous bénéficions des meilleurs produits technologiques actuels en matière de siège …
 
Avez-vous des accords avec d'autres compagnies ?
Un des projets est de mettre en place une alliance avec Air Austral, Air Mauritius, Air Seychelles et Air Madagascar. Ceci afin de mettre en place un "Pass Océan Indien" qui permettra par exemple à un client d'aller de la Réunion à l'île Maurice avec Air Austral, ensuite d'aller de l'île Maurice à Madagascar avec Air Mauritius, puis de Madagascar aux Seychelles avec Air Madagascar, et enfin de revenir avec Air Seychelles à la Réunion.
 
Vous avez aussi été en pourparlers avec XL Airways ?
En effet, à un moment donné, nous avions envisagé une coopération forte avec XL Airways puisqu'il était même question de racheter la compagnie. Ça ne s'est pas fait car, à l'époque, XL avait déjà commencé ses tractations avec La Compagnie. Nos discussions se sont arrêtées là. Mais nous avons conservé bien évidemment avec XL des rapports cordiaux et sympathiques.
 
Ce sont aussi des concurrents…
Certes, mais la coopération figure aussi parmi nos piliers d'entreprise. Pour nous ce n'est pas un vain mot. Ça veut dire que même si nous sommes concurrents, nous pouvons trouver des axes de coopération qui ont un sens pour les deux partenaires, à un certain moment, dans un contexte donné, sur une route donnée. La genèse de cette philosophie est celle-ci : nous sommes trop petits pour pouvoir faire tout, tout seuls. Donc nous devons absolument coopérer avec d'autres compagnies. Comme avec Air Madagascar en ce moment. Au niveau des coopérations il y a 50 nuances de gris. Il peut y avoir des coopérations commerciales, capitalistiques, etc. Nous sommes convaincus que l'une des clés du succès futur d'Air Austral résulte dans sa capacité à mettre en place des accords de coopération.
 
L'arrivée de French Blue à la Réunion vous inquiète-t-elle ?
La concurrence, nous l'acceptons. Nous sommes déjà dans un environnement concurrentiel. Elle est bénéfique pour nous car elle nous oblige à nous améliorer; elle est bénéfique pour le client et pour la Réunion. Donc la concurrence n'est pas le sujet. Le sujet, c'est la capacité que l'on veut mettre sur un marché à un moment donné. C'est là où nous devenons vigilants. Car voler à moins de 80% de remplissage n'est plus rentable. J'aimerais plutôt qu'une compagnie vienne à la Réunion pour ouvrir des lignes sur Francfort ou sur Londres, plutôt que sur Paris qui est déjà très bien desservi. Certains vont dire : un nouveau concurrent arrive avec des prix agressifs, cela va donc entraîner une dynamique de marché ! Je le conçois. Mais seulement jusqu'à un certain niveau. Car après ce sont des parts de marché qu'il va bien falloir qu'il prenne à d'autres. Avec un effet déstabilisateur de positions patiemment construites depuis des années.
 
Du coup, comment la compagnie Air Austral va-t-elle se positionner ?
Nous partons du principe que le client achète une prestation qui est une expérience de voyage Air Austral. C'est notre promesse. Il a acheté un voyage, avec un repas, avec des bagages, avec une couverture, un accueil, etc. Le tout fait partie de l'expérience Air Austral. Mais il y a un bémol, nous devons rester compétitifs. Et nous le serons.
 
Pourtant en comparant Air Austral et French Blue pour un aller-retour mi-septembre, leurs prix d'appel sont inférieurs aux vôtres…
Possible… Pour ma part, j'ai comparé les prix au mois d'août (7 - 14 août). Eh bien, nous sommes moins chers… Tout ça pour vous dire que le "yield management" reste l'outil essentiel pour les compagnies aériennes. Et tout le monde l'applique.
 
Si tout le monde l'applique, il va donc falloir jouer sur autre chose que sur le prix ?
Bien sûr. Et je le répète : c'est l'expérience de voyage au sens large du terme qui fait la différence. Nous sommes sur des vols de 11 heures, il faut de bons sièges tout de même. Le marché jugera.
 
Donc, vous n'êtes pas inquiet ?
Je n'ai pas dit ça. Nous sommes inquiets du risque de surcapacité. Mas nous l'avons déjà pris en compte. Cela étant, je pense que par l'ancrage de notre compagnie, son identité réunionnaise, la qualité de sa flotte long-courrier de 1,3 an d'âge seulement, la qualité des produits et des services, la proximité et la qualité de l'accueil, nous faisons la différence. Plus de plaisir, plus de confort, plus de choix, c'est notre credo.
 
Parlez-nous de votre stratégie à l'international ?
Nous étions faibles sur l'Asie. Et nous sommes en train de combler cette faiblesse. Nous avions un vol qui faisait La Réunion-Chennai-Bangkok que nous avons dédoublé. Nous proposons désormais La Réunion-Chennai directement en B737-800, deux fois par semaine. Et La Réunion-Bangkok, deux fois par semaine également, en B787. Il nous manquait un pays : la Chine. Il nous a semblé opportun d'ouvrir Canton, deux fois par semaine en coopération avec Air Madagascar. Le vol part de Tananarive passe par la Réunion et continue sur Canton. Au retour, l'avion part de Canton fait un stop à la Réunion et termine à Tananarive. Nous essayons toujours de ne pas créer de concurrence inutile, mais plutôt d'apporter une valeur ajoutée. Nous sommes maintenant en phase de consolidation de ces vols. Le vol sur Bangkok marche bien. Mais nous avons encore des parts de marché à prendre en Asie, notamment en Corée ou au Japon. Les vols vers Chennai et Canton demandent à être travaillés de façon plus poussée. Nous avons encore de belles marges de progression. L'Afrique du Sud est également très importante pour nous. Nous y avons introduit une troisième fréquence que nous n'opérons qu'en haute saison, mais nous voulons la pérenniser à l'année.
 
Outre la Réunion, où trouvez-vous vos clients ?
A Mayotte bien sûr, mais aussi à Maurice et à Madagascar. Ce sont les trois destinations qui peuvent "feeder" des clients sur nos lignes long-courriers. Toutes les liaisons dont je vous ai parlé ont pour vocation de nous permettre de développer des ventes à partir de ces marchés extérieurs, d'Inde, de Chine, d'Afrique du Sud. Le marché Réunion ne sera pas suffisant.
 
Misez-vous beaucoup sur Mayotte ?
Il y a deux choses intéressantes. La première c'est que nous avons repris sous forme de filiale la compagnie régionale Ewa. Elle est détenue à 52% par Air Austral et le reste par des intérêts mahorais. Elle est équipée de deux ATR et a vocation à développer le transport régional au départ de Mayotte vers Anjouan, Comores, Madagascar, Diego Suarez, Tanzanie, Mozambique, etc. Comme je vous l'ai dit cette compagnie à un rôle de "feeder" pour alimenter la ligne long-courrier Mayotte-Paris. Je vous rappelle que nous avons trois vols par semaine entre Mayotte et Paris. A partir de juin nous passerons à quatre. Le taux de remplissage est excellent. C'est un franc succès.
 
* RSKO : recette unitaire au siège kilomètre offert

Auteur

  • Nicolas Barbéry
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