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Éclairage politique de Thierry Breton aux EDV : les 100 premiers jours de Trump

Intervention de Thierry Breton, ancien ministre français de l’Économie (2005-2007) et ex-commissaire européen, lors du congrès des EdV sur les 100 premiers jours du retour de Donald Trump au pouvoir aux États-Unis depuis le 20 janvier 2025

« Rien ne m’étonne » répond Thierry Breton à la première question de François Xavier Izenic en ouverture du congrès des EDVayant déjà connu Trump pendant son premier mandat. Il constate une présidence plus structurée, plus vindicative et mieux préparée.

« Jusqu’au mois d’août,, tout était très incertain, Trump le premier, tout le monde pensait que ça serait 50-50. Au final, Trump a gagné le Sénat, le vote populaire et la Chambre des Représentants. Mais en réalité, cela s’est joué de peu : 200 000 vox seulement sur le vote populaire, 3 voix au Sénat et quatre dans la Chambre des Représentants. », souligne l’ex-commissaire.

Trump revient avec un esprit de revanche, convaincu à tort que l’élection de 2020 lui a été volée.

Conséquence : une accélération brutale du rythme politique mondial, comme si 100 jours équivalaient à deux ans.

 

Mot-clé des 100 premiers jours : la perte de confiance

La confiance, pilier fondamental des relations internationales et du droit, s’est effondrée depuis le 20 janvier. Cette confiance s’était construite depuis 1945, sous le « parapluie américain », notamment au sein de l’OTAN.

« Cette confiance, évidemment permet ensuite progressivement de bâtir les règles de droit…Et surtout, dans le monde de plus en plus incertain dans lequel nous vivons, elle permet de renforcer les alliances stratégiques, de refonder l'Europe. Et je pense en particulier aux alliances militaires et de sécurité. »

Aujourd’hui, l’Europe se retrouve dépourvue et vulnérable, face à un allié américain devenu imprévisible.

Et cela a déjà des répercussions internationales :

-En Asie : le Japon souhaite augmenter son budget de défense à 2% voire 3% de son PIB.

-En Europe : certains pays comme l’Allemagne, via Friedrich Merz, évoquent un retour à une défense plus autonome, notamment avec la France et le Royaume-Uni.

« La confiance, ça met des années à se construire, ça peut se détruire en une nuit, c’est ce qui s’est passé le 20 janvier », explique-t-il.

 

La Chine : un rival systémique à la fois partenaire commercial

Depuis son intégration dans l’OMC en 2000 sans contreparties, la Chine a méthodiquement bâti la plus grande base manufacturière du monde (35%). En 25 ans, les Chinois sont devenus « l’usine du monde ». Grâce à une maîtrise du temps stratégique et des chaînes de valeur, elle exerce un quasi-monopole dans plusieurs secteurs critiques (batteries, semi-conducteurs, pharmacie, automobile…).

L’Europe a pris tardivement conscience de cette dépendance structurelle

« Les Chinois savent tout faire. Ils travaillent 70 heures par semaine et ont 10 jours de vacances par an. L'État chinois déverse des montagnes de subventions qui permettent à leurs entreprises de pratiquer le dumping. L’exemple des semi-conducteurs : 55 méga usines sont en cours de construction subventionnées par l’État chinois. »

Néanmoins, l’Europe peut utiliser un rapport de force pour ses négociations avec la Chine : « On va peser plus via un marché unique de 450 millions de consommateurs alors que les Américains sont 330 millions. La Chine a un besoin vital de l'Europe. »

 

La stratégie commerciale de Trump : 3 objectifs majeurs

1. Financer la baisse d’impôt via les droits de douane

  • Réduction de l’impôt sur les sociétés de 30% à 15% passant alors de 500 milliards de dollars à 250
  • Financement par 10% de droits de douane sur 3000 milliards d’importations américaines soit 300 milliards
  • Problème : ce sont les consommateurs américains qui en paieront le prix

2. Réindustrialisation des États-Unis

  • 5 secteurs ciblés : automobile, semi-conducteurs, santé, pharmacie, construction.
  • Méthode de Trump : logique mafieuse : « Je colle 25% de droits de douane supplémentaires dans chacun de ces secteurs. Et puis, si vous venez vous installer aux Etats-Unis, je négocie des rabais. »
  • Politique incitative proche du chantage économique, très agressive.

3. Réduction du déficit commercial

  • Ce dernier s’avère colossal : environ 918 milliards de dollars en 2024 (soit 17% par rapport à 2023)
  • 35 000 milliards de dollars de dette américaine en 2024 soit 123% du PIB
  • Les États-Unis vivent en partie "au crochet du monde", notamment via l’achat massif de bons du Trésor par d’autres pays.

 

Quelle stratégie pour l’Europe ?

L’Europe doit s’unir et assumer sa puissance, notamment sur la scène commerciale et stratégique. Il est nécessaire d’utiliser le principe de réciprocité dans le marché intérieur : si un pays veut accéder à notre marché, il doit respecter nos règles.

« Tout ce que vous voyez aujourd'hui, ça a été initié par Biden et c'est en gros la conséquence l'Infiltration Reduction Act qui a été un aspirateur à projets, donc avec des subventions comme jamais, 20 milliards de TSMC (Taiwan Semiconductor Manufacturing Company), c'était fait sous Biden. Sanofi c'était fait sous Biden, l'automobile c'était fait sous Biden… Il faut qu'on s'organise en Europe. Pour nos projets automobiles par exemple, il faut éviter qu’on y aille un par un. »

 

L’UE a trois fronts de négociation à préparer :

    1. Politique : défendre le droit commercial international.
    2. Industriel : organiser une réponse coordonnée aux subventions américaines.
    3. Commercial/Souverainiste : rééquilibrer les balances commerciales bilatérales.

Pour rappel, l’article 42.7 des traités européens prévoit une clause de défense mutuelle, plus directe que l’article 5 de l’OTAN. L’Europe doit montrer ses dents, assumer une posture de leadership mondial. Face aux « empires déclinants » comme les Etats-Unis et la Russie, l’Europe reste une force en mouvement : démocratie parlementaire bicamérale, marché unique et des valeurs partagées.

 

Selon Thierry Breton, la stratégie de Trump est prévisible si on la comprend bien. L’Europe dispose des outils mais doit les mobiliser avec méthode, unité et volonté politique. Trois fronts, trois équipes, trois approches. « Avec cela, on peut atterrir correctement malgré les turbulences », explique-t-il.

 

 

USA europe

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  • Rédaction
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