Réussir l'accueil d'un stagiaire pour un bénéfice commun

Cela implique des responsabilités. L'idéal est de bien faire le choix du candidat au moment du recrutement et de bien déterminer les tâches qui lui incomberont. tout en sachant qu'il faudra accorder du temps à cette éventuelle future recrue.Certains employeurs ont tendance à l’oublier : un stagiaire se manage comme n’importe quel salarié. Pour Nicole Breurec, directrice de l’institut de formation Cap Vers, bien accueillir un stagiaire exige un certain état d’esprit. "Un stage est un complément de formation, rappelle-t-elle. S’il est vrai que le stagiaire m’offre son travail gratuitement, je dois en échange lui apprendre le métier." Il est donc essentiel d’accepter de le former et de l’accompagner. "C’est donnant-donnant", juge Nicole Breurec, qui accueille elle-même de plus en plus de stagiaires issus d’écoles de commerce. "Ils effectuent un vrai travail pendant trois mois. Comme eux, je dois leur consacrer de mon temps."
Afin de démarrer sur de bonnes bases, mieux vaut s’assurer que le stagiaire ait, dès le premier jour, une place attitrée. "C’est la base, observe Sydney Roturier, PDG de l’agence de voyages Caractères d’Amérique et d’Afrique à Nantes, qui accueille deux stagiaires par an. Après quoi, il est important de lui consacrer quelques heures.". Il s’agit de lui présenter l’entreprise, les locaux, ses collègues et le travail qu’il devra accomplir. "Cet accueil peut être assuré par un tuteur, plutôt que par le chef d’entreprise", relève Antoine Drecher, adjoint de direction du tour-opérateur Sensations du monde. L’idée est d’expliquer au stagiaire ce qui constituera sa tâche principale, tout en lui indiquant qu’il pourra toucher un peu à tout s’il le souhaite. "Il peut être intéressant de lui décrire sa mission par écrit, et de lui fixer une liste d’objectifs à atteindre, suggère Nicole Breurec. Pourquoi ne pas prendre ensuite rendez-vous régulièrement pour faire le point ? Le stagiaire se sentira ainsi responsabilisé, même s’il n’est bien sûr pas question de le laisser se débrouiller sans supervision.".
La ou les premières semaines peuvent être consacrées à la découverte de l’entreprise et de ses produits. "Devenir autonome prend un peu plus de temps pour les stagiaires commerciaux, estime Antoine Drecher. Il faut compter au moins un mois." Du coup, l’idéal pour que le stage soit efficace est qu’il dure de deux à quatre mois. Après une première période consacrée à des tâches subalternes, comme le classement et le suivi de dossiers, une discussion peut être engagée pour dresser un premier bilan du travail du stagiaire. "Il s’agit d’évaluer l’espace de liberté que, sous la supervision d’un parrain, il sera possible de lui laisser", explique Sydney Roturier.
Les employeurs qui évitent de suivre cette démarche s’exposent à des risques. Voué à lui-même, soit parce que personne ne lui confie la moindre tâche, soit parce que le travail qu’il doit effectuer exige plus d’expérience qu’il n’en a, le stagiaire risque d’abord de se démotiver, puis plus grave, de faire des erreurs. "Dans ce cas, inutile de s’en prendre à lui, souligne Sydney Roturier. Une erreur commise par un stagiaire est une erreur commise par l’encadrement. S’il y a une différence de rémunération entre stagiaire et employé, il y a aussi une différence de responsabilité." Un stagiaire laissé en déshérence peut enfin perdre toute envie de poursuivre une carrière dans le tourisme. "Autrement dit, un mauvais accueil, ou tout simplement une absence d’accueil, est dommageable non seulement pour l’entreprise, mais aussi pour tout le secteur", souligne Nicole Breurec.
A l’inverse, un stagiaire satisfait peut s’avérer précieux et faire une vraie différence dans une entreprise. Pour Sydney Roturier, les bons éléments se caractérisent par leur passion pour une destination, ainsi que par leur capacité à s’intégrer à une équipe. "Les forfaitistes doivent aussi savoir faire preuve d’une certaine rigueur, juge le PDG de Caractères d’Amérique et d’Afrique. Même s’ils ont souvent les défauts de la jeunesse et veulent tout faire vite, sourit-il. J’ai souvent été agréablement surpris par les stagiaires que j’ai recrutés. Dans le pire des cas, leur passage est neutre.".
Dans le meilleur, le stage peut se transformer en emploi. La moitié de l’effectif de Sensations du Monde, qui compte 132 salariés, a ainsi intégré l’entreprise à la suite d’un stage. "Nous connaissons une croissance soutenue depuis cinq ans. Accueillir des stagiaires nous aide dans nos recrutements", se félicite Antoine Drecher. A en croire Nicole Breurec, Sensations du Monde n’est pas une exception. "Chez Cap Vers, nous plaçons 150 stagiaires par an. Il y a une embauche à la clé pour 40% d’entre eux." Ceux qui ne sont pas recrutés au terme de leur passage dans l’entreprise sont parfois rappelés plus tard. "Il arrive qu’il ne soit pas opportun de procéder à une embauche, mais qu’un besoin se fasse sentir plusieurs mois, voire un an après, explique Nicole Breurec. Il est alors plus simple et rassurant de faire appel à quelqu’un que l’on connaît et qu’on a vu à l’œuvre." Autrement dit, les stages sont une occasion de se constituer un carnet d’adresses pour les chefs d’entreprise... Voire parfois pour les stagiaires. Exemple avec Sydney Roturier, qui vient de proposer à l’une de ses stagiaires d’intégrer son entreprise. "Elle préfère pour l’instant parcourir le vaste monde, indique-t-il. Je lui ai dit qu’elle pourrait toujours m’appeler à son retour."
Cette possibilité d’embauche ultérieure est à prendre en compte dès le recrutement. "Le stagiaire d’aujourd’hui peut être le collaborateur de demain, souligne Nicole Breurec. Il ne s’agit pas d’accueillir le premier stagiaire venu, mais de le sélectionner comme s’il s’agissait d’un futur collaborateur. Il est donc préférable de rencontrer deux ou trois candidats avant de faire son choix." Au-delà des compétences, la motivation semble faire la différence. "Comme dans un processus d’embauche classique, il faut avant tout que le stagiaire ait envie de venir dans l’entreprise", observe Sydney Roturier pour Caractères d’Amérique et d’Afrique. "Chez Sensations du Monde, nous privilégions dans nos recrutements les gens qui montrent une certaine implication, un véritable désir de participer au développement de l’entreprise, témoigne Antoine Drecher. Malheureusement, beaucoup semblent considérer qu’occuper un emploi consiste à venir à 9 heures pour partir à 18 heures." Pour détecter au mieux les compétences du stagiaire, Nicole Breurec conseille d’enrichir les tâches qui lui sont confiées pendant le déroulement du stage. "Si vous observez qu’il est bon en informatique, confiez-lui un travail dans ce domaine. S’il est féru de graphisme, proposez-lui par exemple la conception des flyers." Au final, le temps passé avec un stagiaire est donc un investissement. "Si vous craignez d’en manquer, abstenez-vous, conclut Nicole Breurec. Ce ne serait bon pour personne."


Les cinq points à respecter
 Ne prenez pas de stagiaire si vous n’avez pas le temps de vous en occuper.
Sélectionnez votre stagiaire comme n’importe lequel de vos collaborateurs.
Prévoyez de lui consacrer quelques heures le jour de son arrivée, afin de l’accueillir et de lui présenter votre entreprise.
 Expliquez-lui sa mission, et fixez-lui le cas échéant des objectifs, assortis d’un calendrier pour les réaliser.
Laissez-lui d’une semaine à un mois pour s’adapter à son environnement de travail, puis confiez-lui des responsabilités à sa mesure, sous la supervision d’un parrain ou d’un tuteur.